Calendrier de l'Avant
Moi aussi, je peux te faire un calendrier de l'Avant. Y a pas que Titch, hein.
Avant, j'étais belle. J'en veux pour preuve la fois où mon voisin du dessous a voulu me reboucher les tro-us. Si, c'est vrai.
Il a sonné, un beau matin. Il était laid, le pauvre, avec de gros yeux globuleux, la lippe pendante et une obséquiosité des plus pénibles.
"Madame, j'entends vos conversations dans ma cuisine. Certainement que vous avez des tuyaux coupés, suite à vos travaux, ce qui fait que j'entends tout."
Gni ? m'interrogais-je. D'abord, ce n'est pas mon voisin du dessous mais celui du 36è dessous. Entre nos appartements, il y en a un autre et que je sache, ses occupants ne se sont plaints d'aucune fuite sonore qui émanerait des tuyaux de cuisine. Et moi, j'ai jamais rien esgourdi depuis des années que mes travaux sont terminés.
Je lui fais part de ce fait, incontournable et marquant. Autant parler à une bûche, le voisin insiste et me dit " Si vous voulez, je viens vous les reboucher dans la semaine, les trous".
Il veut absolument voir les tuyaux effectivement coupés au ras du sol de ma cuisine. Je tente de lui expliquer, en vain, combien il est improbable que les sons sortis de sa grosse bouche aient une chance d'atteindre ainsi mes esgourdes et qu'en plus, je suis légèrement sourdingue.
Voyant que je ne me débarrasserais de l'importun farfelu qu'au prix d'un compromis, je finis par céder à sa demande et l'autorise à venir le surlendemain s'exciter sur mes tuyaux.
Je ne croyais pas si bien dire. Sur le pas de la porte, le coquin de m'inviter à déjeuner avec lui le lendemain. Je vois mieux de quelle tuyauterie il voudrait s'occuper.
Celle-là, on ne me l'avait encore pas faite."Euh non, ça va pas être possible" ai-je répondu, et j'ai demandé à Mi Broteur 2 de recevoir le Monsieur avec son gros pinceau à reboucher les tuyaux, pendant que j'aurais foutu le camp pour pas croiser le plombier pervers.
Depuis, le comique s'est fait lourdé par sa meuf, probablement lassée de ses cornes qui l'ont obligée à remonter les chambranles de ses portes pour pouvoir passer, comme en son temps le marquis de Montespan, fier cocu du roi de France.
C'était pour dire rien du tout. Si ce n'est qu'avant, c'était mieux.