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ça va saigner
20 février 2010

MARCIA

TITIPfou, là ça va moyen, rapport à des Brésiliens qui pensent qu'à se tortiller les parties génitales dans des strings en strass! Oué, lecteur, j'en ai après le pays de Lula où acheter un tableau en vente publique revient à se faire plumer aussi tranquillement que Marcia, héroïne de ce billet. Bref, je suis grave énervée et en furetant sur le blog de Lilas, ses histoires de bestioles m'ont rappelée que j'étais rien de mieux qu'un sombre héraut mexicain de la défense animalière.

Voici l'histoire de Marcia, l'oiselle, histoire de me calmer.

Je séjournais en Haute Alsace, chez l'une de mes meilleures amies qui avait l'intention saugrenue de fêter son anniversaire en plein mois de juillet.

Toujours prête à apprendre, je la regardais préparer son tiramisu et suivais ses instructions pour bien étaler la crème après avoir trempé les biscuits dans la liqueur de café avec la rapidité chronopostale propre à leur conserver une fermeté digne d'un caractère bien trempé (wow).

Nous sortons dans le jardin cueillir quelques baies pour orner nos verrines pleines de mousse au chocolat. La voisine se pointe alors à la haie, avec ses 80 balais sonnés mais une allure plus jeune (assez, en tout cas, pour plaquer un gros chien dans une surface de réparation).

"Yo, Myyyyyriam ! Regardez, j'ai ramassé ce pauvre oiseau que mon cabot n'arrête pas de courser. Prenez-le, sinon le chien va le finir" jappe -t'elle avec son accent fortement tonique. "Euh non, voyez-vous, je fais une allergie aux volatiles que ça me fait enfler le goître et que ça risque de m'étouffer. Tiens, prends-le toi " me dit-elle avec autorité (c'est même pas vrai, elle a horreur de toucher les oiseaux). "ok, pas de problème, donnez-moi cette bête que ça en fera une de moins dans votre périmètre" asticoté-je malicieusement la voisine.

C'est un genre de merle, mais en plus clair. Je fais remarquer qu'il lui manque les plumes arrière. Hormis cette épilation caudale à coup de canines canines (pfiou, ça c'est fortiche) qui lui donne l'air d'un petit poulet avant embrochage, l'oiseau n'est pas blessé, juste fatigué par ses efforts pour échapper au gros chien, lui-même coursé par sa proprio. Un vrai Tex Avery : l'oiselet sans défense, le gros chien bavant et des plumes plein la gueule, la maîtresse le plaquant au sol, jusqu'à ce que 30 Millions d'Amis déboulent dans le jardin.

Je dépose délicatement le zozio dans l'herbe et j'attends. Rien. Immobilité parfaite, oeil fixe, plume terne. Je le pousse légèrement du doigt. Il tombe sur le côté mais se reprend en tentant une fuite pédestre. Oh-oh, on veut jouer alors ? stimulé-je la bestiole plus sonnée que le quart à la Cathédrale de Strasbourg. Je me dis que peut-être elle a faim, la déplumée et je teste ces dames sur le menu préféré de ce type de créature, en précisant que je n'irai pas jusqu'à déterrer des vers. Points d'interrogation et électroencéphalogramme plat de mes deux acolytes, soulagées de m'avoir refilé le bébé. Je saisis l'annuaire et appelle le Centre des Oiseaux à 40 km à vol d'oiseau (hin). De la viande rouge, ça irait alors? Et un tartare saignant sans ketchup, avec une petite mousse bien fraîche ! Chaud devant ! Las, la bête n'en veut point, boudant comme jamais Ingliche Titcheur ne saurait et pourtant, c'est une championne.

Je reprends l'oiseau dans mes mains pour tenter une ultime expérience : je vais le lancer et il sera bien obligé de voler, ce con. Mais comme je me méfie de ses réactions, je prévois de le rattraper en cas de faiblesse. Bien m'en prend : il se laisse jeter et tomber comme une pierre entre mes mains. Bon, là, ça fait une heure que je m'occupe de toi, et tu fais ta tête de mule. Je t'explique que Myriam a deux chats plus féroces que moi quand j'ai faim et qu'ils vont incessamment sortir de leur torpeur et de la maison pour faire joujou avec toi. Pas de réaction. Décidément, petit, tu commences à me picorer les sinus gravement, d'autant qu'on n'a pas fini de préparer cette soirée. Comment te protéger des chats maintenant que tu es sorti des crocs du chien ? Après intense fouillage dans la cave, Myriam rapporte une jolie caisse à chat (waha) en osier ajouré avec de l'air qui passe et un couvercle fermé par une tige. Épatant! Je l'installe là-dedans avec un matelas confortable de vieux chiffons, je ferme le couvercle et place la boîte à l'ombre du grand cerisier, car il fait monstrueusement chaud. 

Nous retournons satisfaites de cette solution habile qui nous permet de vaquer la conscience apaisée, là-haut dans la cuisine, pour préparer toutes sortes de mets et chercher sur Internet à quelle race peut bien appartenir le petit oiseau. Une merlette, ce serait. Habituée des haies, ça ne vole pas très haut et c'est pour ça que le chien a pu lui coller des baffes. Et ça mange quoi, une merlette ? Des rollmops ? En Alsace, ça se peut. Il paraît que si on en recueille, il ne faut pas les regarder, ça les stresse et ça les paralyse. Bon, bin là, elle va se calmer, la cocotte,  bien tranquille toute seule dans sa caisse en osier que moi-même ça me donne envie d'y dormir.

2h plus tard, redescendant dresser les tables dans le jardin, je la vois. La boîte. En plein soleil. Je pâlis d'horreur, ayant totalement oublié le principe de l'ombre qui change bêtement de place. J'ouvre fébrilement le couvercle. Couchée en chien de fusil, au milieu d'un tas de plumes attestant une agonie atroce par déshydratation et insolation, le bec tristement entr'ouvert, la merlette en avait fini avec cette chienne de vie. (Oué, je sais, j'aurais dû lui mettre un chapeau).

Le rouge au front, j'ai la douleur de faire part du décès de Mme Merlette le 12 juillet 2009 dans d'atroces souffrances, à mon amie qui se moque de moi et rit fort peu charitablement. Je ris aussi, et du coup, je la baptise Marcia. Je ne sais pas quoi faire de son cadavre car il faut libérer la chambre la caisse en osier, des fois qu'il y aurait une autre urgence. Myriam m'indique le compost au fond du jardin. 

À 20 h, les invités arrivent en masse, pour certains accompagnés de petits enfants chous trottant partout. Nous buvons en pensant à Marcia sans nous étrangler, car le crémant est délicieux. Myriam raconte l'histoire de la merlette ou comment faire le bonheur d'un oiseau malgré lui. J'en profite pour me dédouaner habilement en vouant aux gémonies la voisine qui n'a pas respecté les lois élémentaires de la jungle, en voulant sauver un oiseau avec lequel elle n'avait même pas de lien de parenté, pour l'abandonner traîtreusement à des étrangères sans scrupules et accélérer ainsi la fin d'une espèce, certes commune mais indispensable à la grande chaîne de la vie, et ce, de la plus sordide des façons.

Au même moment, un cri strident sort de la bouche tordue d'effroi d'un garçonnet de 5 ans qui, à force de fouiner partout, vient de tomber sur le cadavre de l'emplumée avec lequel jouent consciencieusement les chats de la maison.

Je prends Marcia par la patte et lui fait faire un dernier vol plané chez la voisine.

Si vous croyez que c'est drôle, merle alors.

 

 

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Commentaires
L
... Je l'avais raté celui-ci !! sombrero ! Wouar wouar wouar !!<br /> <br /> (pardon)<br /> (je sors)
L
... Je l'avais raté celui-ci !! sombrero ! Wouar wouar wouar !!<br /> <br /> (pardon)<br /> (je sors)
Q
Bravo, Elisa ! Enfin quelqu'un qui aime mon "sombre héraut" ! Tu as gagné le droit de revenir en 2è semaine !
E
ah le sombre "héros", je meurs!!!
Q
Ouah, là, Marie, tu me flattes !!! Flatte-moi comme disait Fufu à Montand !!!
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