LES VALISES (épisode 1)
Mon mari adore les valises. Je sais pas d’où ça lui vient, ça encore. Encore un TOC non expliqué. Un trouble obsessionnel compulsif. Pour lui, il ne s’agit pas de compter les dalles des trottoirs et se sentir obligé de faire un saut de côté tous les 5 carreaux ; ou de vérifier 50 fois que les portes sont bien fermées, en faisant un signe de croix et une génuflexion à chaque tour de clef sinon c’est l’angoisse assurée.
Non, pour Robert (c’est mon mari, mais on l’appelle Lulu), pour Lulu donc, les choses sont plus simples. Moins graves peut-être. Quoique. Il est pris d’une violente fièvre acheteuse tous les mois quand il reçoit les pubs de Hurrican Compress. Eh oué, ça fait classe d'avoir plus d'une carte de crédit et 3 stylos à la pochette, quand on est sous-chef de rayon de vélo à Tandem&Co Ltd.
Voilà qu’un matin, le facteur apporte un gros colis rectangulaire, environ 1mètre sur 70 cm. J’ouvre fébrilement, toute attendrie que mon Lulu ait pensé à m'offrir un truc, et découvre une valise en cuir jaune moutarde avec poignées en fer noir, genre patinée à l’ancienne mais moche. Je sais pas pourquoi, j’ai dans l’idée d’ouvrir la valise et surprise, je découvre qu’elle contient une 2è valise. Je me dis « tiens, c’est pas banal » et j’ouvre la 2è valise.
Vous le croirez pas, je découvre une 3è valoche dans la 2è. Une toute petite mignonne valise. Qu’est ce que je fais ? J'ouvre la 3è petite valise. Mais là, plus rien. La déception. Limite la dépression. C’était bien parti pourtant.
Des valises gigognes. Fallait y penser. Pour le rangement, c’est pratique. Parce qu’à utiliser, je vois pas bien l’intérêt du principe. J’ai pas eu à me poser la question longtemps vu qu’elles n’ont servi qu’une fois. Les poignées en fer, trop fines, ont lâché les unes après les autres, quand le taxi a voulu les sortir du coffre, à l’aéroport.